Autisme : le jour se lève pour les approches scientifiques
En France, le vrai débat sur l’efficacité des psychothérapies n’a jamais pu avoir lieu à cause de l’intransigeance d’une majorité des psychanalystes totalement fermés à toute discussion scientifique et au principe même d’une évaluation de leurs pratiques. Leur « résistance » s’explique aisément : dans les pays où le débat sur les théories et les pratiques psychanalytiques a pu avoir lieu, elles ont été abandonnées, laissant ainsi la place aux méthodes d’inspiration cognitivo-comportementale évaluées et validées.
Les approches psychanalytiques de l’autisme
Elles trouvent leurs racines dans un système de croyances dogmatiques qui accuse pêle-mêle la mère d’être trop froide, trop chaude, fusionnelle, dépressive, incestueuse, phallique, psychogène, et d’être ainsi à l’origine de l’autisme de son enfant.
Cette théorie psychanalytique de la « toxicité maternelle », qui ne fait que répéter l’image de la femme « continent noir » de la psychanalyse, date de Bettelheim et de « La forteresse vide » (1967) et a continué à faire des ravages en France1. Avec des images et des concepts tels que ceux de « forteresse vide », de « mère-frigidaire », de « mère-crocodile », de « psychose autistique », de « folie à deux », elle a tenté de faire obstacle aux approches qui sortaient du champ conceptuel de la psychanalyse (voir l’article de Baudouin Forgeot d’Arc, « L’autisme, un trouble de la cognition sociale ? »).
La réalité de la connaissance scientifique
Pourtant, la connaissance de ce trouble a beaucoup progressé depuis cinquante ans. Tout d’abord, plutôt que le terme « autisme », les professionnels préfèrent utiliser désormais celui de « troubles envahissants du développement » rendant mieux compte, au-delà de caractéristiques communes, de la grande hétérogénéité entre les syndromes autistiques. Des dysfonctionnements du cerveau ont été précisément identifiés (voir Gilbert Lelord, « Autisme : la maman est acquittée… » et Franck Ramus, « Bons et moins bons arguments dans les débats sur l’autisme et la psychanalyse »), et la composante génétique a été explicitement prouvée (voir Bertrand Jordan, « Autisme et génétique, une relation avérée mais complexe… »).
Les prises en charge et traitements
Dès 2002, les associations telles qu’« Autisme Europe » avaient alerté le gouvernement français, puis les instances européennes, sur les carences de l’accueil et du traitement de l’autisme. Pourtant sur le terrain, rien n’a changé. Les personnes autistes et les familles d’enfants autistes ont continué à se heurter au manque de structures d’accueil et aux pseudo-traitements non validés, comme le packing ou la pataugeoire-thérapie (voir James Rivière, « L’implication des psychomotriciens dans le packing et la pataugeoire thérapie »).
Or, des traitements évalués et validés, même s’ils sont encore limités au regard de la pathologie, permettent de réelles améliorations et une meilleure intégration des personnes avec autisme, particulièrement s’ils sont mis en œuvre de façon précoce. Ils rendent intolérables les systèmes de croyances qui prévalent encore en France (voir Maria Pilar Gattegno, « Les approches scientifiques de l’accompagnement des personnes avec autisme »).
Les combats d’arrière-garde de la psychanalyse
Dans notre numéro 299*, nous avons informé nos lecteurs du procès intenté à Sophie Robert, auteur d’un documentaire diffusé par « Autisme sans frontières », Le Mur ou la psychanalyse à l’épreuve de l’autisme.
Ce documentaire, qui aurait pu passer presque inaperçu, a suscité la réaction indignée de trois des psychanalystes qui avaient consenti à être interviewés mais qui, après avoir visionné le film, se sont rendu compte qu’il ne servait pas la cause de la psychanalyse. Estimant avoir été piégés, ils ont traîné la réalisatrice en justice pour obtenir l’interdiction de diffusion du documentaire et de lourds « dédommagements » financiers. Sophie Robert a été condamnée le 26 janvier 2012 par le Tribunal de Lille pour « atteinte à l’image et à la réputation » ; elle a fait appel.
* Autisme : les « délires scientifiques » des psychanalystes par Brigitte Axelrad, SPS n° 299.
En jouant une fois de plus la vertu outragée, les descendants de Freud et de Lacan préparent eux-mêmes la fin de leur règne.
En 2004, des psychanalystes ont poursuivi leur action contre toute tentative d’évaluation auprès du Ministre de la Santé pour obtenir le retrait du rapport de l’INSERM. En 2005, ils ont essayé d’empêcher la publication du Livre noir de la psychanalyse. En 2011, ils ont tenté d’interdire d’antenne Michel Onfray sur France-Culture ou encore de supprimer une subvention à son université populaire de Caen.
Aujourd’hui, les psychanalystes revendiquent à grands cris l’« humanisme » de leur approche de l’autisme contre ce qu’ils appellent le « dressage pavlovien » des thérapies comportementales, et se proposent de « construire une nouvelle alliance du sujet et de son corps » (sur notre site Internet, Nicolas Gauvrit, « Autisme et psychanalyse : une rhétorique d’esquive et de contradiction »). Et trois d’entre eux tentent de faire interdire un documentaire (voir l’encadré « L’affaire du Mur »).
Combats d’arrière-garde ! Car il s’agit non pas d’un conflit idéologique mais tout simplement de l’avancée des connaissances scientifiques, qui remet en cause une situation archaïque et devenue intolérable aux yeux de ceux qui sont confrontés à la maladie dans leur famille, et qui constatent l’exception française en terme de prise en charge appropriée.
À l’image d’une médecine fondée sur les preuves, il est grand temps qu’en France on puisse promouvoir des thérapies évaluées et fondées sur les preuves et que l’on mette au rencart les croyances et les pratiques pseudo-scientifiques. Les personnes avec autisme, leurs familles, ont droit à des traitements et des prises en charge validées et efficaces. Fort heureusement, il semble que le jour se lève pour les approches scientifiques en ce domaine !
1 Ainsi, Françoise Dolto en 1985 : « l’autisme, en fait, cela n’existe pas à la naissance. Il est fabriqué. C’est un processus réactionnel d’adaptation à une épreuve touchant l’identité de l’enfant » (La cause des enfants, p. 492, cité par B. Jordan dans Autisme, le gène introuvable).
SOURCE : http://www.pseudo-sciences.org/spip.php?article1877
AFIS : Asociation Française pour l’Information Scientifique