Autisme, le parcours d’obstacles des familles

Posted by autisme.info31 On juin - 1 - 2012 Commentaires fermés

Face à ce handicap encore trop méconnu, les parents doivent souvent batailler des années pour obtenir le diagnostic puis la prise en charge de leur enfant.

Gabriel ne marche pas à dix-huit mois  ? Pas étonnant, c’est un enfant fainéant. Il pleure beaucoup, ne dort pas la nuit  ? Normal, ses parents ne sont pas assez autoritaires… De rendez-vous en rendez-vous chez les pédiatres, Cécile Giraudet et son compagnon entendent tout. Mais pas que leur enfant est autiste. Non, Gabriel est seulement reconnu épileptique, et tous ses troubles du comportement (absences, incapacité à attendre, morsures sur ses avant-bras, etc.) sont imputés à cette maladie.

C’est en passant du temps sur des forums Internet que Cécile Giraudet commence à poser son propre diagnostic.

Il faudra attendre que Gabriel ait cinq ans et demi pour que le verdict tombe enfin : il souffre d’autisme atypique.

Le cas de Gabriel est loin d’être isolé, car en moyenne, en France, l’autisme est diagnostiqué à l’âge de six ans.

Les médecins ont pourtant les moyens de repérer les signes  de l’autisme «  dans les dix-huit premiers mois de l’existence  », selon l’Inserm.

Or, «  plus un enfant est pris en charge tard, plus la stéréotypie est installée, plus la communication est difficile, plus les troubles du comportement s’installent et persistent », alerte Christine Neplaz, directrice de l’institut médico-éducatif (Ime) Notre Ecole, à Paris.

«  Le diagnostic a été un soulagement, se souvient Cécile Giraudet. On savait qu’on allait pouvoir trouver des solutions mieux adaptées grâce à ça. » Gabriel est alors scolarisé dans un service d’éducation spécialisée et de soins à domicile (Sessad) pour enfants épileptiques, absolument pas approprié à son autisme.

«  Il avait une très mauvaise image de lui, car il était tout le temps mis à l’écart et puni. Il était en souffrance  », confie sa maman.

Prise en charge partielle

Le diagnostic a beau représenter une victoire pour les parents, il est loin d’être un aboutissement. Seulement le sésame pour accéder à l’obstacle suivant : la scolarisation.

Alors que 80 000 à 90 000 enfants autistes sont en âge d’être scolarisés, seuls 20 % sont accueillis en milieu ordinaire et 30 % en Ime ou hôpitaux de jour. Les autres restent sur le carreau.

A titre d’exemple, l’Ime Notre Ecole a une liste d’attente de 64 dossiers parisiens et d’une vingtaine provenant d’autres départements. En moyenne, les familles doivent attendre deux à trois ans pour que leur enfant puisse intégrer cet établissement.

«  Quand les parents sont armés, ont un réseau et se battent, ça bouge. Les autres peuvent attendre. C’est un peu la jungle », déplore Olivier Géret, directeur du Sessad Paris Autisme Intégration.

Pour les enfants qui en bénéficient, la prise en charge est souvent partielle et peu adaptée, car les auxiliaires de vie scolaire (Avs), les enseignants et même des professionnels de la santé ne connaissent pas l’autisme.

Par ailleurs, vouloir offrir à son enfant un encadrement adapté a un coût.

«  On s’est dit que les Avs non formés, ça suffisait, donc on a recruté un accompagnant dans un cabinet privé », se souvient Cécile Giraudet. La nourrice de Gabriel lui coûtera 1 500 euros par mois, certes pris en charge dans le cadre de la prestation de compensation du handicap, mais celle-ci n’est versée qu’un an après que la famille en a fait la demande. Chaque séance chez la pédopsychiatre coûte 90 euros, remboursés sur une base de 27 euros. Résultat, le couple reste dans un trois-pièces alors qu’un deuxième enfant va venir au monde. Et Cécile consacre toutes ses journées de Rtt aux rendez-vous pour Gabriel.

Une vie sociale fragilisée

Malgré toutes ces épreuves, le couple a tenu. Ils font partie de la minorité de résistants, puisque 80 % des parents d’enfants autistes se séparent, selon une étude menée dans plusieurs départements français pour l’association Autisme France.

Cécile et son compagnon sont parvenus à conserver leurs métiers d’architecte-urbaniste et de graphiste – «  Je n’ai pas la carrière que j’aurais voulu avoir », reconnaît-elle –, mais peinent à maintenir une vie sociale digne de ce nom. «  Les invitations se font de plus en plus rares, mais, surtout, nous avons renoncé de nombreuses fois à sortir, car nous ne voulions pas gêner ni être regardés avec pitié », confesse-t-elle.

Il y a quelques semaines, Gabriel, qui va bientôt fêter ses huit ans, a enfin trouvé l’Ime qu’il lui fallait. Il est «  apaisé, plus calme, il dort toute la nuit ». Mais sa mère est inquiète pour la suite :

« Je vais mourir en me disant que j’abandonne Gabriel. Il sera toujours dépendant d’une société qui n’est pas bienveillante.  »

- [01.06.12] Elsa Maudet


Un terrible recours : l’exil

D’après un avis du Comité consultatif national d’éthique (Ccne) datant de 2007, 3 500 enfants et adultes atteints de syndromes autistiques, de troubles du comportement ou de handicaps mentaux sont accueillis dans les instituts médico-pédagogiques… belges. La prise en charge des enfants est financée par l’assurance-maladie française, celle des adultes par leur département d’origine.
De quoi envoyer un message dramatique, selon le Ccne :

« La meilleure façon de permettre l’insertion sociale des enfants et des adultes atteints de syndromes autistiques, c’est de les envoyer dans d’autres pays d’Europe, dans lesquels leur insertion sociale est reconnue comme un droit. »

Et une fois devenu adulte  ?

«  Pour les adultes, c’est simple : il n’y a rien. C’est dix fois plus dramatique que pour les enfants, c’est le désert  »,

charge Vincent Gerhards, président du collectif Autisme. Alors que le deuxième plan autisme prévoit l’ouverture de 2 000 places d’accueil pour les adultes à l’horizon 2014, seules 342 étaient installées fin 2010.

La prise en charge se fait en France comme si l’enfant autiste ne devenait pas adulte.

Passé 16, 18 ou 20 ans, les autistes doivent quitter les établissements pour enfants et atterrissent dans un no man’s land où les places d’accueil sont rarissimes. Avec une conséquence déplorable : 60 % des personnes internées plus de trente jours en hôpital psychiatrique sont des adultes autistes.


Source : http://www.viva.presse.fr/Autisme-le-parcours-d-obstacles_16991.html

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