Interview de Tony Attwood sur les femmes asperger (VIDÉO)
Interview du Dr Tony Attwood sur les femmes asperger (mise en ligne en 2009) – durée 10 minutes.
La traduction de cette vidéo a été retranscripte bénévolement par Madame Jeanne Loucq.
Retrouvrez-là ci-dessous :
- Dr Attwood, globalement les statistiques sont que pour 4 garçons qui naissent autistes il n’y a qu’une seule fille. Est-ce que cette observation est exacte ?
Non, je ne crois pas que ce le soit. Quand on parle de SA nous remarquons que les filles sont douées pour camouffler leurs confusions sociales, se cacher dans un groupe et font en sorte d’être sures de ne pas être remarquées. Si vous êtes attentifs le rapport est en fait probablement d’environ 1 fille pour 2 garçons.
- Interessant merci… ceci est basé sur vos observations en Australie ou bien globalement ?
Nous détectons cela globalement. Mais aussi nous le remarquons dans notre clinique ici à Brisbane qui se concentre à la fois sur les enfants et sur les adultes, et vous savez dans le groupe des adultes nous comptons 1 fille pour 2 garçons. Et ce sont des femmes qui avec de la maturité ont pris conscience qu’elles ont toujours été différentes et elles ont eu suffisamment confiance en elles pour vérifier cela. Ou bien alors elles ont eu elles-mêmes un enfant autiste et SA. Donc je pense par cette voie alternative que le rapport est probablement d’une fille sur deux garçons.
- La première question nous vient de Rudy Simone. Rudy est l’auteur de « 22 choses qu’une femme devrait savoir lorsqu’elle aime un homme Asperger » et aussi « Asperger sur leur lieu de travail » et Rudy est elle-même sur le spectre de l’autisme. Voici sa question : ‘ Existe t’il une formation particulière à ce jour qui soit prévu pour les psychologues, les psychiatres et les docteurs pour les aider à détecter le SA chez les femmes qui très souvent vivent sans diagnostic ? ‘
Une partie des formations actuelles est axée sur les filles et les femmes Asperger. Dans mes présentations, j’y consacre presque toujours une section pour ceux qui dans l’audience écoutent mes descriptions des Asperger. Je les illustre toujours de composantes pour les filles. Mais quand on regarde les diverses façons dont les filles Asperger sont repérées il se peut qu’elles ne soient pas identifiées avant l’adolescence et qu’un deuxième trouble soit mis en avant tel que l’anorexie, la dépression, un toc, etc… Et quand l’on tient compte de toute l’histoire du développement de la personne alors on peut reconnaître qu’il y a en effet un syndrome d’Asperger mais il se peut que cela n’arrive pas avant qu’elles aient atteint l’adolescence ou qu’elles aient une vingtaine d’années avec des difficultés au niveau relationnel, etc… que nous pouvons identifier comme étant présents. Mais parfois les professionnels qui les reconnaisse ne sont pas nécessairement des professionnels de l’autisme et du syndrome d’Asperger. – Mon ami et collègue Michelle Garnet et moi-même, il y a quelques semaines, avons contribué à un atelier durant deux jours spécialement organisé pour les filles et les femmes qui ont le syndrome d’Asperger ici à Bristol et nous avons abordé quelques aspects spécifiques mais la partie la plus importante de la présentation fut 4 descriptions de femmes avec le syndrome d’Asperger de leur enfance et la manière dont elles s’y prenaient pour se cacher dans divers groupes. Elles se faisaient intimider, taquiner et tourmenter mais n’en n’ont jamais informé les autorités . Cet atelier s’est extrêmement bien déroulé et j’espère qu’aux USA et dans d’autres pays dans l’avenir je pourrai faire d’autres ateliers spécifiquement pour les filles et les femmes qui ont le syndrome d’Asperger. Je pense que cela serait très bien accueilli par les gens.
- Oh , en fait c’est encourageant d’entendre que des gens organisent des conférences autour de ces informations car chacun sait qu’elles doivent se répandre. Très bien poursuivons. Dr Attwood d’après votre expérience, à quoi les parents doivent ils être attentifs pour leurs filles qui sont en âge d’aller à l’école afin qu’elles puissent devenir des adultes productives et fassent parti de la communauté ? Cette question vient de l’auteur Anne Molan qui a écrit » Believe and the future now »
Bien nous avons là une excellente question. Pour les filles en âge d’aller à l’école, les difficultés vont être l’intimidation et les taquineries de la part des autres filles ce qui peut prendre des tournures horribles en terme d’estime de soi. Il peut être question de mode, de maquillage, de relations entre filles et garçons, etc… L’univers social des filles est plus intense que celui des garçons. Et si vous êtes mal à l’aise dans cet environnement, cela va affecter votre estime de vous et votre identité de manière assez tragique. Donc ma préoccupation est que nous avons besoin de travailler avec un groupe de pairs pour identifier 1 fille ou deux qui puissent devenir un soutien. Je me suis aperçu que parfois les filles Asperger peuvent avoir une amie, peut-être une seule amie à la fois et c’est tout ce sur quoi elles peuvent compter. Mais sans ami elles ne peuvent se prémunir, s’orienter et se protéger des prédateurs. Alors mon avis est qu’il faut travailler avec les pairs sur l’acceptance, la tolérance et un “buddy systems” un systeme d’amitié. ( C’est un programme scolaire en vogue ici en Australie- lequel permet aux élèves plus âgés de guider et d’offrir leur amitié aux élèves plus jeunes afin qu’ils puissent apprendre à combattre ceux qui cherchent à les intimider, les brimer.)
- La question suivante nous vient de Lydia qui a une fille de 17 ans qui s’appelle Anna et elle demande comment les filles Asperger peuvent elles dévellopper de meilleures amitiés?
Je pense qu’elles ont besoin d’apprendre mais la plupart des activités et des groupes de compétences sociales sont conçus pour les garçons. Lorsque par le passé nous avions des groupes de compétences, les filles étaient en minorité, or je pense qu’elles ont réellement besoin d’avoir l’opportunité de rencontrer d’autres filles, afin de se lier d’amitié avec d’autres filles qui ont le syndrome d’Asperger, parce qu’elles se comprennent, mais aussi parce qu’elles ont besoin de quelqu’un qui puisse leur fournir un certain degré de guidance d’une capacité professionnelle comme à la clinique “ Lion and Hearts” où nous avons commencé des groupes qui se concentrent exclusivement sur les filles pour les aider à faire face aux problèmes qu’elles rencontrent de l’école élémentaire et au collège.
- Dr Attwood , est ce que ceux ci sont initialement conçus pour être des groupes sociaux ou bien des groupes académiques ?
Ce sont vraiment des groupes sociaux qui aident à comprendre les mécanismes de l’amitié, les questions liées à l’estime de soi, etc… Il y a une partie où nous nous concentrons sur un sujet sur lequel le groupe souhaite travailler. Chaque groupe est unique et chaque individu qui le compose est unique. Nous ne pouvons déterminer à l’avance ce par quoi nous allons passer. Donc ce que nous avons tendance à faire c’est dire: ok les filles, quels que soient vos problèmes, que pouvons- nous faire pour vous aider à les résoudre ?
- Est-ce que les parents participent à l’organisation de ces groupes aussi ?
Oui mes collègues les organise, et pour que cela soit une réussite, nous avons besoin de reléguer les informations aux parents et aussi faire suivre auprès des écoles. Les filles sont exposées à être très absorbées par ce qu’elles font et peuvent devenir dépressives ou alors s’échapper dans leur imagination, dans des fictions ou encore s’inventer des amis imaginaires et vont souvent être négligées.
- Revenons à une autre question d’Ann Mollan. Comment est-ce que les femmes Asperger s’intègrent t’elles dans le domaine du travail ?
Evidement il existe des métiers plus appropriés pour les filles et les femmes Asperger. Cela peut être travailler dans une bibliothèque mais elles peuvent aussi s’inclure dans l’enseignement. L’enseignement dans des écoles spécialisées et auprès de la petite enfance , elles peuvent être particulièrement talentueuses dans ces domaines. Mais je connais aussi un certain nombre de femmes Asperger déterminées à devenir des conseillères, des travailleuses sociales, des psychologues et des chercheuses en autisme. Et finalement devenir des conseillères dans ce que j’appelle des membres de leur propre culture pour les aider de multiples façons à atteindre un certain degré dans leur profession pour enfin devenir à leur tour des spécialistes en autisme. Je pense que c’est une idée fabuleuse.
SOURCE : Autisme support network